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Accueil du site // // Sally Bonn // J154 - Entre l’énoncé du vent et le vent

3 juin 2011- J 154

 

Je m’interrogeais ce matin sur la différence qu’il y aurait entre les notions de pratique et d’expérience, à propos de l’espace. 


Il y a dans L’invention du quotidien de Michel de Certeau cela sur l’espace et ce qui le différencie du lieu que l’espace est un « lieu pratiqué », ce qui induit temps et mouvement. En ce sens, la marche, dit-il, est une réalisation spatiale du lieu, j’y entends une « actualisation » au sens aristotélicien du lieu qui devient espace.


Ainsi, je me demandais ce qui différencie cette notion de pratique de celle d’expérience. Y aurait-il une différence d’intention ou de participation ? Une pratique de l’espace serait « motivée » (en tous les sens du terme) et donc active alors qu’une expérience de l’espace est passive, reçue ? Il y aurait dans la pratique de l’espace une mise en mouvement qui serait intérieure, qui viendrait de l’intérieur (qu’est, dès lors, cet intérieur ?) quand l’expérience de l’espace viendrait de l’extérieur, d’une série de stimulations externes qui engagent tous les sens ? Il me semble que les propositions artistiques peuvent se penser comme étant à la lisière entre cette pratique et cette expérience de l’espace dont il me reste à penser les modalités.


Lu cela, dans cette Lettre à personne qui continue à m’accompagner dans l’écriture comme dans la réflexion :


« Georges Bataille écrit : « La différence entre expérience intérieure et philosophie réside principalement en ce que, dans l’expérience, l’énoncé n’est rien, sinon un moyen et même, autant qu’un moyen, un obstacle ; ce qui compte n’est plus l’énoncé du vent, c’est le vent. » (O.C., t. V, p. 25). Contrairement à Bataille, je ne pense pas que l’énoncé soit un obstacle, puisque, selon moi, il est au contraire un moyen tout à fait nécessaire, mais de même que G.B… oppose expérience intérieure et philosophie, de même j’oppose « biographie » et discours philosophique : pour le philosophe, du moins me semble-t-il, le discours (la réflexion qui aboutit à un juste énoncé) est primordial, tandis que, pour le « biographe », le plus important c’est le cheminement, la vie, l’histoire, l’expérience – même si le cœur de l’expérience est non-expérience. »


N’y a-t-il pas quelque chose entre l’énoncé du vent et le vent lui-même ? N’y a-t-il pas un lieu, un espace plutôt (de Certeau) entre le discours et le cheminement ? Un discours du cheminement, donc ?