Recherche

Accueil du site // // Sally Bonn // J139

19.05.2011 / J139

À présent, me voici en phase avec cette chronique ou ce journal ou ce récit d’écriture et de recherche.

Je recommence.

Comme d’ailleurs, puisque j’entame la deuxième partie, j’ai l’impression de recommencer à zéro (la première partie est imprimée et postée, partie). Je commence l’analyse des œuvres et je cherche à montrer que l’écriture des textes, dans sa dimension performative, a ouvert un espace qui est celui dont les œuvres ont besoin pour être vues et perçues.

Je me retrouve un peu dans un creux, entre les deux parties – dans ces cas-là, je parcours ma bibliothèque, à la recherche d’un livre. J’y trouve un autre, que je ne cherchais pas (ou du moins que je ne cherchais pas là ni à ce moment là, mais qui faisait partie de l’horizon à appréhender). Il s’agit des Variétés 1 et 2 de Paul Valéry. Je l’ouvre et tombe sur une phrase notée il y a quelque temps et que je ne retrouvais plus, la voici dans son contexte :

« Mallarmé, m’ayant lu le plus uniment du monde son Coup de dés, comme simple préparation à une plus grande surprise, me fit enfin considérer le dispositif. Il me sembla de voir la figure d’une pensée, pour la première fois placée dans notre espace… Ici, véritablement l’étendue parlait, songeait, enfantait des formes temporelles. L’attente, le doute, la concentration étaient choses visibles. Ma vue avait affaire à des silences qui auraient pris corps. Je contemplais à mon aise d’inappréciables instants : la fraction d’une seconde, pendant laquelle s’étonne, brille, s’anéantit une idée ; l’atome de temps, germe de siècles psychologiques et de conséquences infinies, - paraissaient enfin comme des êtres, tout environnés de leur néant rendu sensible. »

L’étendue parlait, dit Valéry à propos de ce dispositif mallarméen. Voir la figure d’une pensée placée dans notre espace. Le projet de ce travail sur les textes d’artistes trouve dans ces mots de Valéry tout à la fois une sorte de justification et un sens, une perspective.

Je ne peux pas, cependant, ne pas m’inquiéter de ce genre de « hasard » qui me fait trouver parfois, retrouver ici, une phrase, un texte, une réflexion ou une pensée qui entre en résonnance ou se conjugue avec le sujet de la recherche dans l’instant précis d’un suspens de l’écriture, qui tout d’un coup trouve sa juste place dans le cours des idées et vient, selon, permettre de poursuivre et de reprendre ce qui paraissait l’instant d’avant vague ou lointain. Étrange sensation que les choses, mais aussi l’écriture et même au fond la pensée tient à peu.