Recherche

Accueil du site // // Sally Bonn // J125 Retour / J35

04.02.2011 / J+34 / J35

Est-ce un journal ou une chronique ? N’appréciant pas le terme de journal qui renvoie à une forme d’intimité qui ne me sied pas et qui ne correspond ni à l’esprit de ce qui relève d’une forme de travail certes annexe de celui de l’écriture de la thèse, mais tout de même réflexif, ni au sujet de la thèse elle-même qui porte sur un type d’écriture lui aussi réflexif et distancé par rapport à ce qui serait une forme de récit du quotidien, j’interrogeais mon amie Pascalle M. sur ce qui distingue selon elle le journal de la chronique, ce à quoi elle me répond, qu’il lui semble que la différence tient à ce qui est relaté. Un journal tenant le sujet au centre du récit quand la chronique s’attache à des événements dont l’auteur est le témoin. Puis quelques heures après, PM ajoute que cela a surtout à voir avec la position de celui qui écrit. Au centre pour le journal, périphérique pour la chronique. Ce pourquoi, et je la cite, « les chroniques sont une chose si ancienne et les journaux un fait d’écriture récent (tout étant relatif) ». Du coup, je continue à m’interroger sur ce qu’est ce « journal » qui porte mal son nom, et dont le nom ne renvoie qu’à la datation, à la temporalité. Mais cette temporalité a ici quelque chose d’artificiel puisqu’elle n’est signalée et formalisée que dans le cadre du déroulé d’une temporalité finie, dans un horizon déterminé. C’est dans le parallèle avec le travail en train de se faire que le temps est ainsi marqué, suivant cette espérance qui est aussi une nécessité que le nombre de jours augmentant, le nombre de pages augmente aussi. Ce n’est donc pas tellement les jours du calendrier qui sont une manière de se situer dans une temporalité générale, mais le décompte des jours qui passent, qui importe ici pour ce journal qui n’en est pas un. Un texte de Barthes dans Le bruissement de la langue sur le journal et qui a pour titre « Délibération », dans lequel il s’interroge sur la tenue d’un journal, sur la nécessité et le sens de cette pratique d’écriture dont il doute, dans un premier temps, de la valeur. La justification d’un journal intime ne peut être, dit-il, que littéraire. Les doutes de Barthes sur le journal s’étendent au fil du texte – ce n’est pas un texte que le journal, dit-il encore. Le journal est un discours. « Mais le Journal ne peut-il être précisément considéré et pratiqué comme cette forme qui exprime essentiellement l’inessentiel du monde, le monde comme inessentiel ? – Pour cela, il faudrait que le sujet du Journal fût le monde, et non pas moi ; sinon, ce qui est énoncé, c’est une sorte d’égotisme qui fait écran entre le monde et l’écriture ; j’ai beau faire je deviens consistant, face au monde qui ne l’est pas. Comment tenir un Journal sans égotisme ? » C’est bien la question. Et c’est bien pour cela que je ne tiens pas à ce que cet objet encore indéfini : texte/discours/journal/chronique… soit désigné par le terme de journal.